From/de & to/à Olivier, Léone, Dagô, Jean, Shira, Olivia and/et Elena.
– On a dit, bonjour, for us, translation is not about moving from a language to another. On a dit, pour nous, la traduction n’est pas une affaire de source/cible. It has to do with power relations, et les enjeux politiques des langues. On a dit, pour nous, la traduction est un geste d’adresse situé, engagé, a way of interrogating contexts and revealing forms of domination, or resistance. On a dit, translation is often invisibilized, even when it is used and required. We said, nous savons que vous arrivez d’endroits différents avec des langues et des langages différents, et qu’il vous faut apprendre le français, et que vos langues de travail (le français et l’anglais) ne sont pas partagées de la même façon pour chacunE. We asked, comment troubler notre rapport aux langues in this highly constrained setting? On a demandé, comment faire avec les langues au pluriel, the frencheS, the englisheS, sans oublier la présence de TOUTES LES AUTRES LANGUES ? Mais aussi, how to unlearn language? We said, bienvenue aux langues pas forcément comprises par touTEs. Là, on a dessiné des ♥. On a demandé, essayons de réfléchir ensemble à ce qu’on traduit, or ne traduit pas, when do we continue, or refuse to translate, et qu’est-ce que ça produit ?
– Tu as dit, it feels nice not to be in charge of the translation. You said, il y a toujours une traduction, it’s always a question. Tu as dit, pour moi, la traduction n’est pas un jeu. I did not fully recognize how much of a problem it was. Tu as dit, it is a disability, an impossibility, c’est douloureux, it’s exhausting. There is always a delay, you said, things can never be told and heard in real time. It hurts, you said once more. Tu as demandé, est-ce que ça ne pourrait pas juste rester un problème (instead of becoming a game, or an occasion for creation) ? Tu as dit, c’est vrai que c’est une question de pouvoir, entre celleux qui parlent les deux langues ou pas. Mais pour moi qui traduis le plus, c’est aussi épuisant.
– On a dit, peut-être que « play » n’est pas le bon verbe pour parler de traduction. On a demandé, comment on choisit les verbes et les termes qui nous semblent justes ? How do we address the issues at stake in translation? How do we care together about what it does to us? Translation is not about being right or wrong: même là où ça fait mal ça peut devenir une ouverture.
– À propos de verbes, on a lu cette citation de Mirene Arsanios et on s’est demandé, quelles langues chacun·e de nous pourrait « lick, smoke or loose » ?
– You said ____ [this language] was a forgotten language, until recently it was not a daily language, it was secret. Then, it was re-habitated. What does it mean to re-live a language, what it provokes, the wars it creates? Tu as dit, quand je prends une langue que je mange, une langue que j’aime, je vais en lécher toutes les parties, c’est quelque chose que je savoure. Tu as dit, ____, c’est ma bête noire. C’est comme un monstre. Depuis l’école primaire, c’est une langue que j’ai envie de parler et je n’ai toujours pas réussi à trouver le temps de l’apprendre. ____ rime avec le verbe « perdre » pour moi.
– You said, I put ____, ____, and ____ here, in « smoke », because somehow languages inhabit me rather than I co-habit with them. I put them here because it’s a place where I can cross in-between languages without thinking too much. It creates space to invent words that don’t exist, everything is possible. Tu as dit, I want to lose the languages of the Empire. You asked, what does it mean to chew the language, digest it, like something that is not separate but part of the body. Vous avez dit, there is something about distance that is not necessarily negative: si on est au même endroit, on ne peut pas partager.
– You said, translation is not a tool, it is a relation. It is emotionally engaging. Tu as dit, quand je traduis ici, ce n’est pas un service, je ne suis pas payé·e pour le faire. Tu as dit, WE NEED TO BE CO-RESPONSIBLE. La responsabilité du maintien de cette relation doit être partagée. You said, if I translate to someone who is not responsive, who is not showing that they are listening, l’énergie dont j’ai besoin pour continuer s’éteint. Tu as dit, we need to create and maintain the fire between translating and receiving. You asked, comment garder le vivant de cette communication ?
– We asked, comment faire de la traduction une manière de prendre soin de la situation ? On a dit, translation implies a reciprocal transformation, qui nous place à la fois en situation de vulnérabilité et d’empowerment. On a dit, la traduction est inséparable de l’écoute : to voices, accents, silences… It requires being attentive to what is not being said as much as to what is being said.
– Tu as dit, we need to talk to each other, so that it does not become the elephant in the room. Tu as dit, il faut penser les choses d’un point de vue structurel, la traduction n’est pas un problème personnel, it should not be. You said, il faut parler à l’institution, elle aussi doit prendre ses responsabilités. Tu as dit, the institution is not the only one to blame, la situation dépend aussi de chacun·e de nous. You said, il faut construire des outils pour parler à l’institution, tu as dit mais aussi à l’équipe, tu as dit mais aussi aux personnes invitées, tu as dit mais aussi aux groupes qui viendront après nous, tu as dit mais aussi entre nous, to raise awareness about the situation and work on it collectively. You said, tools that could remain after our departure.
– Tu as dit, la traduction demande du TEMPS. It takes time. And many things happen en même temps. You said, c’est aussi une question de durée. Tu as demandé, how long can we maintain this kind of attention? Physiquement, you mean. Tu as demandé, comment trouver des solutions et des stratégies pour s’entraider dans la traduction, même si on échoue et que ça reste difficile ? You asked, how to make it lighter for each other?
– Tu as dit, sometimes I struggle to be together, to be here, to adapt. I struggle to understand. Je me sens pris à contre-pied. Mais je m’adapte. I know that translation is a double labor. Tu as dit, vous ne devez pas vous sentir obligé·es de traduire pour moi. Parfois, la traduction se passe après, on discute et je comprends mieux.
– You said, for me, our starting point is that nobody needs more care than someone else. Ce n’est pas seulement une question de traduction, c’est une question intersectionnelle. Everybody needs equal care and we are all responsible for it. Tu as dit, focusing on language does not conceal the fact that it is painful to be in a relationship (au-delà du langage lui-même). Tout ce qu’on dit à propos de la traduction – prendre soin, être vulnérable, listening – est vrai de n’importe quelle relation. Tu as dit, en fait, language is not the problem. We want to talk about the relationship. Tu as dit, on n’a pas besoin de tellement d’outils pour ça. It needs to be simple.
– You said, the needs for translation change in relation to different kind of situations. Parfois, tu as dit, la traduction doit être mise sur pause. Parfois, il faut traduire chaque mot, because each word means a world. You said, for me, in a feedback situation for example, it’s more useful when the translator summarizes briefly and then adds something. Tu as dit, oui, pour maintenir la joie et l’énergie de la discussion.
– Tu as dit, body language and gestures are the first languages existing in a room. Gestures mean a lot but they are also dangerous to read into. Ils peuvent être interprétés de travers, you said. Tu as dit, peut-être qu’on peut juste commencer par se dire les choses. Mais tu as dit, I like leaving silences, a space for breathing. Laisser de l’espace avant ou après d’autres interventions, not jumping directly into translation. Tu as dit, il me semble qu’il y a une hiérarchie qui privilégie le silence. Tu as dit, if I speak right after you without leaving a silence, it is because I trust the fact that I can speak from the heart without thinking first. Tu as dit, parler vite et respirer moins, ce n’est pas moins politique, au contraire.
– You said, we need to communicate about our respective needs and expectations, we cannot assume that they are the same. Tu as dit, c’est compliqué d’établir des règles. Tu as dit, ce sur quoi nous sommes en train de travailler est difficile à mettre en place la plupart du temps. Tu as dit, it demands space and conditions and I don’t know how much it will last. Tu as dit, when a stone falls, each person protects their head. Tu as dit, nous ne sommes pas toustes d’accord sur la part de responsabilité individuelle ou collective. We said, les astuces personnelles et situées n’ont pas moins de valeur, elles peuvent faire bouger les choses chez les autres.
– Le lendemain, on a demandé, qu’est-ce que cela te fait de traduire et/ou d’être traduit·e ? We asked, instead of considering that translation produces a loss, could we understand it as a process of transformation?
– You said, four words are reoccurring: responsabilité, contrôle, importance, pouvoir. The volume of the words is changing depending on if I’m translated or translating. Tu as dit, in both instances, I thought about intimacy in translation. Les mots qui reviennent sont : confiance, ouverture, écouter et être écouté·e, l’échange. You said, in small groups, translation allows for a better quality of listening, trying to understand each other’s thoughts and emotions. Cela semble aussi plus intime. Tu as dit, la traduction devient un problème quand on est plus de deux ou trois personnes.
– You said, j’avais l’impression de recevoir quelque chose de très précieux venant de ma traductrice, it moved me. Tu as dit, j’ai traduit depuis ____, une langue que je ne comprenais pas. Tu as dit, I let myself be guided by her voice, her positions in space, her ways of walking or punctuating silence. Tu as dit, je voulais m’investir par le corps. You said, c’était comme dans un rêve, I did not remember everything from the dream, mais je devais me souvenir de certaines parties pour traduire et décortiquer. You said, translation is one possible way of saying things, il y a toujours d’autres manières de dire les choses. Tu as dit, translation always make me feel that I’m exploding in multiple fragments, pas seulement à cause de toutes les choses que je pourrais dire, mais aussi de toutes celles que je n’ai pas dites, après avoir fait un choix. You asked, how can we see and touch what we cannot say?
– On a demandé si, peut-être, plus on se sent fragmenté·e, plus cette multiplicité permet de s’approcher, sinon d’une totalité, du moins d’une réunification. There is always more than just one choice.
– Tu as dit, from thinking to speaking, sharing is already translating. Tu as demandé, jusqu’à quel point est-il acceptable de changer le sens à travers la traduction sans manquer de respect à la personne qu’on traduit et qui est à côté de nous ? You said, the risk is not about me becoming you, but about you becoming me, and you not having the choice. You said, faut-il renoncer parce que c’est impossible ? Or surrendering to the process and trusting it? Tu as demandé, how close is it to a matter of life or death?
– Tu as dit, in larger group dynamics we often identify figures of authority and the gaze goes to the most powerful person in the room. Parfois, au contraire, en situation de traduction, on identifie les personnes qu’on croit être les plus faibles et c’est elles qu’on regarde. You asked, how to refrain from this? Tu as demandé, quand on partage nos faiblesses, quelque chose d’aussi personnel, quelle est la limite entre la générosité et l’imposition d’un fardeau au reste du groupe ? Sometimes, I feel that it’s unfair. Tu as dit, il faut trouver un équilibre entre réserve et empathie. You said, ça vaut aussi pour la traduction.
– We said, translation is about being a collective, about togetherness and, we’ve said that already, it’s about relationships. On a dit, la traduction nous rappelle qu’on n’est jamais à des niveaux de compréhension équivalents, on doit tout le temps composer avec ça. That’s the reason why it’s always so emotional and political en même temps.
– You read your notes about translating while performing and they said, le corps qui se déplace vers moi dégage une sérénité dans cette atmosphère mystérieuse où je viens de déposer une fleur. You repeated the word, SERENITY.
– Nous avons répondu le mot POROSITY. On a dit, engaging translation as a mode of address (rather than understanding) and mutual transformation. On a dit, ce qui compte, c’est la relation mise en jeu. You said, what matters, beyond words and stories, is the quality of presence. We said, translation is indeed also a way to question authorship/authority, because suddenly there are two (or more) voices and forms involved. Jusqu’où est-ce que j’accepte de perdre la main sur ce qui est dit ? How far do I accept to relinquish control over what is being said?
– Tu as répondu, yes but who is allowed to translate or not? Qui est ou se sent autorisé·e, légitime, à traduire ? You said, we need to pay attention to the circumstances, à chaque fois, to what/whom they allow and what/whom they prevent (to speak). Tu as dit, very often, in our working situations, translation is silenced, stressful, it’s as if it should be as little visible as possible. It becomes embarrassing and unpleasant. Tu as demandé, comment faire de la traduction autre chose qu’un sous-titre, but make it a problem and a texture of this encounter? How to make it useful?
– You asked, how do we apply tender tools in untender situations?
– Tu as dit, ça ne m’intéresse pas de philosopher sur le sujet. Let’s be practical. Tu as dit, c’est la meilleure manière d’accueillir la rencontre.
– Tu as dit, I’m not sure I understand, but I think I agree.
Merci pour ces mots, votre qualité de présence,
Thank you for these words, your quality of presence,
Virginie