Programme détaillé
Lundi 9 novembre 2020
10h – 13h30
Chaque participant·e est invité·e à se présenter, dans la langue de son choix, en répondant aux questions suivantes :
Quelle(s) langue(s) employez-vous de préférence pour parler ? Pour écrire ? Dans quelle(s) langue(s) pensez-vous ? Dans quelle(s) langue(s) rêvez-vous ?
Un mot décrivant (dans la langue de votre choix) ce qui vous semble nécessaire pour établir une atmosphère de travail collectif dans laquelle vous vous sentez bien;
Un mot décrivant (dans la langue de votre choix) ce qui, pour vous, perturberait cette atmosphère de travail collective.
Les mots qui ressortent de la première liste sont : écoute, plaisir, laughter, convivial, broucabrou, confusion, vibration, connexion, une atmosphère ambulante, share and care, égalité, attention, acknowledge, disponibilité, absurde, donner, عطاء, acceptance, alchemy, extérieur, ouverture. Ceux de la deuxième : tense, être forcé·e, relâche, suer, numbness, exploitation, hierarchy, prise de pouvoir, homogénéité, manipulation, silence, rigidité, normativité, ennui, abus de pouvoir, pouvoir, juger, to judge each other, BIG.
Suite à cela Virginie, Victorine, Vir Andres et Line racontent l’histoire de Qalqalah قلقلة et de ses manifestations, et introduisent les enjeux du workshop.
Enfin, Mounira prend la parole pour présenter son travail artistique et les coulisses de NOA (Not Only Arabic) — sur lesquels elle reviendra dans un entretien avec Qalqalah قلقلة. Elle reprend un texte publié en 2015 sur Ibraaz, qui raconte la genèse de ce projet, et revient sur son ancrage politique, marqué par les conflits entre le Liban et Israël. Elle conclut sur les formes de partage performatives de NOA, qu’elle qualifie volontairement d’exclusives, c’est-à-dire fondées sur la rencontre.
La discussion qui s’ensuit aborde les questions d’adresse, de regard (gaze), d’attention à des corps et des expériences pluriel·le·s, d’oralité, et de la clandestinité comme tactique artistique.
14h30 – 16h
L’atelier reprend l’après-midi avec un défrichage collectif du Schizo et les langues ou La Phonétique chez le psychotique, texte écrit en français par l’auteur américain Louis Wolfson qui a appris cette langue - et d’autres - en autodidacte. S’y qualifiant d’« étudiant de langues schizophrénique », il y expose minutieusement son procédé lui permettant de « désosser » (selon les mots de Deleuze, dont la préface a largement contribué à l’immédiate fortune critique du récit de Wolfson) sa langue maternelle, l’anglais, dont chaque mot entendu ou lu lui fait profondément violence.
Le schizo et les langues constitue une référence importante de NOA 3. Sa lecture, en regard de deux autres textes transmis aux exerce en amont du workshop - le carnet de recherche écrit par la chercheuse Myriam Suchet pour Qalqalah قلقلة et l’article “Language and sexuality” (langue et sexualité) de la chercheuse et traductrice Nayla Mansour (publié sur Al-Jumhuriya le 28 janvier 2019) -, a été pensée comme un temps théorique à l’orée du workshop, devant précéder les présentations croisées de nos pratiques à toutes et tous et la mise en place de nos lexiques. Le travail entre les langues, du français si particulier de Louis Wolfson à sa traduction dans nos anglais de travail parfois évasifs, se révèle ardu et peut-être moins propice au travail critique collectif que nous ne l’espérions.
C’est au tour des exerces qui le souhaitent (Julia Barrette-Laperrière, Anat Bozak) de présenter leurs recherches au prisme de ces quatre questions :
Comment la (les) langue(s) que je parle (ou non) affectent-elles ma pratique ?
Comment mon travail circule-t-il de l’espace chorégraphique à l’espace de l’écriture et vice-versa ?
Quelles opérations de traduction, ou erreurs de traduction, se jouent dans ce travail ?
Mardi 10 novembre 2020
10h – 13h30
La matinée s’ouvre par des présentations de recherches par des membres de Qalqalah قلقلة (Virginie, Vir, Line). Les exerces reprennent les présentations commencées la veille (Luara Learth Moreira, Acauã El_Bandide Sereya, Christian Romain Kossa).
14h30 – 16h
L’après-midi est consacré à une séance de travail collectif autour de NOA 3. Des exercices de lecture et de jeu, parfois reposant sur la voix, parfois chorégraphiques, sont réalisés collectivement à partir des consignes ayant présidé à la rédaction de NOA 3 :
- ton préféré ou moins préféré :
« (…) Je voudrais vous inviter à écrire une liste de vos mots préférés ou les moins préférés. Les mots peuvent être dans votre propre langue maternelle ou dans une autre langue que vous maîtrisez ou non. À côté de chaque mot, j’aimerais que vous écriviez en une phrase ou deux, pourquoi ce mot est-il votre préféré ou le moins préféré ? » - Préjugés
« (…) Pourquoi des mots de préjugé ? Si nous nous attardons sur les NOA précédents, le premier abordait la question de la trahison et le second la notion d’arrestation. Pour décrire un acte de trahison, il faut le mesurer par rapport à un principe prédéterminé de loyauté ; tandis que l’arrestation d’une personne consiste principalement à entraver la liberté de mouvement de la personne, par exemple, le fait d’arrêter une personne soupçonnée d’un acte criminel pour l’amener en procès devant un tribunal. Ce qui constitue l’accusation pour une telle arrestation est une combinaison d’un principe prédéterminé de loyauté en tant que bien moral et de la suspicion de quelqu’un-e qui enfreint la loi : un préjugé. Les éditeurs de NOA ont décidé de faire l’archéologie des vocabulaires entourant les préjugés, pour s’entraîner à former des jugements qui ne sont pas encore prononcés, mais qui sont constamment à l’œuvre. »
Mercredi 11 novembre 2021
Durant la matinée, chaque groupe constitué travaille à la mise en œuvre de son lexique. Ceux-ci sont ensuite présentés à tout le groupe durant l’après-midi, aboutissant à un moment de danse collective déchaînée et jouissive.